lundi 26 janvier 2009

Les Misérables







Un pont de Paris, la nuit, la pluie...
La Seine roule de lourds sanglots
Dans la folle rumeur de ses flots,
Brassant, diluant le morne ennui

Qu'une faune étrange et bigarrée
A distillé tout le jour, au coeur
De la ville aux multiples splendeurs.
Allons, partez! Bourgeois chamarrés,

Vieux beaux, créatures en mal d'amour,
Marginaux de toutes conditions,
Etrangers de diverses nations.
Car la nuit vous chasse avec le jour.

Voici l'heure où la fille publique,
Sous la pluie, arpente le trottoir
Et vend, un misérable pourboire,
Son corps flétri à l'homme lubrique.

Instant béni des âmes obscures,
Portant en elles un spleen torturant,
Instant béni, combien déchirant,
De ceux dont la vie n'est que blessures.

Poètes, au ventre et aux poches vides,
Et tous les amoureux en guenilles,
Traînant, au coeur de la vieille ville,
Un pas lourd et un regard avide.

Un pont de Paris, la nuit, la pluie...
Dans la folle rumeur de ses flots,
La Seine roule de sombres maux...
Qu'un soir triste, elle unit dans son lit...

*

©Patricia M.

3 commentaires:

  1. Pourtant, qu'elle est belle, la nuit parisienne... Triste ou mélancolique, comme toutes les nuits, de quelque endroit qu'elles soient, mais belle, lumineuse, peuplée de murmures, d'histoires secrètes aux coins des rues, de longues romances au fil de la Seine et de ses ponts, de tragédies encore, qui remontent à la mémoire, pêchées dans quelque roman d'un Hugo, d'un Zola, d'une Vargas...
    Il a quelque chose de vaguement décalé, ton poème. Comme une histoire que retiendrait le passé, où des visages oubliés reparaîtraient à l'ombre des portes cochères, visages d'ombre eux-mêmes. Et il s'y mêle le temps d'aujourd'hui, les nuits d'à présent, un peu comme si rien n'avait vraiment changé. Et au fond, les nuits ne sont pas si différentes de ce qu'elles furent il y a dix, cinquante ou cent ans... Les hommes non plus n'ont pas tellement changé, pourquoi leurs cités reflèteraient-elles autre chose que ce qu'ils sont ?

    En passant, je trouve la nouvelle présentation de ton blog vraiment très agréable. Couleurs douces, plus vivantes que les précédentes, et l'image d'en-tête est bien jolie...

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  2. Ce sont un peu ces nuits-là que j'ai voulu faire revivre, ces nuits d'un lointain passé dans la ville aux multiples facettes, aux multiples splendeurs, aux multiples misères...
    Mais ce sont les premiers mots d'un poème de Verlaine qui m'ont inspiré la suite. Alors décalé, oui sans doute un peu mais pas vraiment...Les hommes n'ont pas tant changé, la détresse devant la condition humaine non plus, je crois...

    Je suis ravie que tu aimes cette nouvelle présentation, ravie de ton passage, merci ! :)

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  3. Moi ça me fait penser à "la nuit tous les chats sont gris". J'sais pas pourquoi ...
    Ah, si, c'est justement parce que y'a pas de chats, dans cette nuit là : que des ombres glauques. C'est pas si tant gai que ça, tes nuits parisiennes. Tu devrais vraiment te pencher sur le problème du chat ...

    En fait, j'l'aime que pour une chose ce poème : la Seine qui roule de lourds sanglots. Ca, c'est bien vu. J'crois que je vais te le piquer ...

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